François Roustang : la position du thérapeute

« La position thérapeutique, c’est ce autour de quoi s’organise la rencontre ; elle définit l’édification du système de relations entre le thérapeute et le thérapisant. »
« En prenant sa place, le thérapeute construit un espace thérapeutique singulier, où plus il est lui-même, plus il est pour l’autre et par l’autre. »

La rencontre avec la singularité de l’autre

C’est en nous que prend forme la singularité de l’autre. Le thérapeute est celui qui s’émerveille par anticipation devant quelqu’un au bord d’une nouvelle vision du monde, devant une autre manière de vivre.
On exige du patient qu’il soit lui, qu’il le soit totalement, c’est insupportable, donc il résiste. Quand quelqu’un se laisse reconnaître comme unique, il se sent exister. Mais on n’a aucun pouvoir sur cette singularité.

Le point d’ancrage du thérapeute : s’appuyer sur l’existence certaine de son corps vivant. Être présent de corps avec une telle intensité et une telle liberté que le poids de notre présence devienne léger.
Il s’agit d’être là comme un pachyderme et à la fois comme un oiseau.

La disposition

On se prépare à se mettre en contact avec tout le monde du patient. C’est par rapport à cela qu’on se dispose. On se place soi-même de manière confortable. Etre présent à son corps, être là pour tout capter, pour se laisser absorbé tout entier par l’autre. Je mets mes propres images entre parenthèses.

L’impuissance, est un autre nom de la disposition

Reconnaître mon impuissance va permettre au patient de mobiliser sa propre liberté, ses propres ressources. Mon impuissance est le lieu où le patient peut déployer sa propre imagination. Car, c’est le patient qui détient la solution.

Accéder au sentir large

L’appréhension du sentir est réciproque. Par son sentir large, le thérapeute ouvre le patient à son sentir propre ; il le sort de la considération étriquée de son existence. Le thérapeute invite le patient à remettre en mouvement son propre sentir, pour rejoindre le lieu où apparaissent des nouveaux liens, et de nouveaux possibles.

La veille paradoxale du thérapeute est une condition nécessaire

Le thérapeute par sa posture, par ses gestes, sa voix montre qu’il est totalement attentif au patient. Il y est tout entier et en même temps il n’attend rien.

La situation s’est renversée, le thérapeute est hypnotisé par son patient- il s’est retiré à l’extrême de ses intentions propres, il s’est placé lui-même en état de veille généralisée ;
C’est parce qu’il précède son patient sur ce terrain, qu’il pourra l’y entraîner.

S’il est indispensable que le thérapeute fasse avant son patient le saut dans la concentration, c’est que cette dernière ne peut exister sans relation. Elle en est l’essence même.

La sensorialité – le corps

Il est important pour F. Roustang de revenir à l’unité corps-psyché.
La psyché séparée de la sensorialité ne peut pas se guérir ; la guérison passe par la sensorialité, par son rétablissement, son élargissement. Il cite Aristote « la psyché c’est ce qui anime le corps »

La transe permet l’arrêt des pensées. Il cite Wittgenstein : « ne pensez plus, regardez » Quand on arrête le train des pensées, on entre dans notre sensorialité, on est dans l’intelligence du sentir.
Le retour au sentir permet la guérison parce que si nous allons mal, c’est que nous ne sentons pas ce que nous sentons, nous ne voyons pas ce que nous voyons.

« Chaque fois qu’il arrive avec la plus grande exactitude de penser ce que l’on pense, de sentir ce que l’on ressent, d’éprouver ce que l’on éprouve, on entre dans la vie du monde et on participe à sa puissance. Cette adéquation élémentaire pourrait bien être une excellente définition de l’état hypnotique ou une définition parfaite de la liberté humaine ».

Bibliographie

Roustang F. Qu’est-ce que l’hypnose ? (Les éditions de minuit, 1994).
Roustang F. La fin de la plainte (Odile Jacob, 2000).
Roustang F. Il suffit d’un geste (Odile Jacob, 2003).